Comment est calculé le besoin en fumure de fond avec la méthode Comifer ?
Les doses d'engrais de fond, pour les éléments phosphore et potassium, à apporter en France sur les espèces de grandes cultures, peuvent être calculées selon la méthode Comifer, largement reconnue et régulièrement remise à jour depuis plus de trente ans. Même si des tables ou logiciels fournissent directement un résultat, en unités d'engrais à apporter, selon le type de sol, la culture à implanter et l’objectif de rendement, il est intéressant de comprendre comment et sur quelles bases ce calcul est réalisé.
« La fumure de fond a pour objectif de compenser les exportations par les cultures, explique Alain Canard, spécialiste de la fertilisation chez Soufflet Agriculture. Pour déterminer les quantités d’un élément à apporter, le Comifer propose dans un premier temps, d’évaluer celles qui vont être exportées. Elles correspondent au rendement prévisionnel de la culture, multiplié par la teneur en P2O5 et en K2O des grains récoltés ou de la matière végétale totale exportée. »
Des cultures plus ou moins exportatrices en éléments P et K
Par exemple, la racine de betteraves, à 16 % de sucre, exporte 0,5 kg/t de phosphore et 1,8 kg/t de potassium et, le maïs grain, 0,6 kg/q de P2O5 et 0,55 kg/q de K2O. Ce qui signifie qu’une betterave sucrière avec un rendement de 85 t/ha exportera 42,5 unités de P2O5 par hectare et 153 u/ha de K2O. De même, un maïs avec un rendement de 100 q/ha, à 15 % d’humidité, exportera 60 u/ha de P2O5 et 55 u/ha de K2O.
« Attention certaines cultures, dont on récolte la totalité de la matière verte, sont fortement exportatrices de phosphore et de potassium, ajoute le spécialiste de la fertilisation. C’est le cas de la luzerne et des cultures fourragères. La luzerne déshydratée, par exemple, exporte autour de 6 kg/tMS de P2O5 et jusqu’à plus de 30 kg/tMS de K2O. Si son rendement atteint 12 tMS/ha, elle va exporter 70 u/ha P2O5 et surtout plus de 300 u/ha de K2O ! »
Le calcul de la dose effective d'engrais à apporter
Le Comifer propose ensuite de multiplier les quantités de phosphore et de potassium exportées par un coefficient qui varie en fonction des espèces et de la teneur du sol en cet élément, selon des grilles publiées la première fois en 1993 et réactualisées à plusieurs reprises depuis. En gros, ce coefficient tient compte du niveau d’exigence de la culture en l’un et l’autre des éléments. Plus les cultures seront exigeantes vis-à-vis d’un élément, plus le coefficient sera élevé. « La betterave sucrière et les pommes de terre par exemple sont très exigeantes à la fois en P et K, souligne Alain Canard. Le coefficient appliqué sera plus élevé que pour des cultures moyennement exigeantes comme le maïs ou l’orge, ou des cultures peu exigeantes, comme le blé. »
Selon la richesse des sols en phosphore et potassium
Le coefficient varie aussi en fonction de la teneur en l’élément dans le sol et du passé récent en apports d'engrais P et K. « Il sera plus élevé dans un sol faiblement pourvu en phosphore et potassium que dans un sol à teneur élevée en ces deux éléments, poursuit le spécialiste. Si le sol est bien pourvu, le coefficient peut être inférieur ou égal à 1, pour compléter par un apport d'engrais, l’utilisation des réserves du sol. Il peut même être de zéro, revenant à conseiller l’impasse de fertilisation sur des cultures peu ou moyennement exigeantes ou si la teneur dans le sol est vraiment très élevée. »
Voir l’exemple du blé (lien avec l’article Fertilisation du blé, les apports en phosphore et en potasse). Mais attention, toute impasse ou réduction répétée, équivalant à des apports en dessous des doses d’entretien, conduit, à plus ou moins long terme, à vider les réserves du sol en éléments nutritifs, laissant augurer une carence. La gestion de la fertilisation peut ainsi avoir de graves répercussions à long terme sur le capital sol.
L’analyse de sol, un outil de vérification
Si la quantité de phosphore ou de potassium apportée est supérieure à la quantité exportée, la teneur du sol va augmenter et inversement. La variation des teneurs en P2O5 et K2O entre deux analyses de terre permet de vérifier si le rythme de fertilisation appliqué est adapté au fonctionnement du sol.
